7 - La course à la mer

 
La bataille continua d'ailleurs. Après la bataille de la Marne, ce fut la bataille de l'Aisne, qui se prolongea pendant les dernières semaines de septembre et bien au delà. Mais bataille, cette fois, comme figée sur place, faite d'engagements partiels presque quotidiens, horriblement meurtriers, se terminant en faveur tantôt de l'un des adversaires, tantôt de l'autre, et n'amenant jamais de résultats d'une importance décisive. Les noms qui émergent d'une multitude de noms sont, dans cette région, Craonne, Souain, Berry-au-Bac.

Des tentatives furent dirigées sur Reims et sur Soissons : elles échouèrent; l'ennemi s'en vengea en ruinant à peu près ces deux villes et en incendiant la cathédrale de Reims !

Plus à l'Est a lieu la bataille des Hauts-de-Meuse. L'ennemi essaie de forcer cette barrière, entre Verdun et Toul, qu'il n'avait pas osé affronter au début de la guerre. Il attaque vainement le fort de Troyon, le fort des Paroches; il réussit à enlever le fort du Camp des Romains et, grâce à la chute de cette position, à s'emparer de Saint-Mihiel, dont nous ne pûmes de longtemps les déloger, malgré tant de sang versé dans la forêt d'Apremont et aux Éparges.

Mais c'est en allant vers l'Ouest et en remontant au Nord que se déroulèrent les opérations les plus intéressantes de cette période. Immobilisés sur un front qui restait à peu près inébranlable de part et d'autre, les deux partis voulurent se donner de, l'air, se déborder réciproquement dans les espaces qui jusqu'alors s'étaient trouvés en dehors des hostilités. Ce fut, depuis Compiègne jusqu'à la mer du Nord, une sorte de lutte de vitesse, un glissement continu d'infanterie et d’artillerie, précédées par de la cavalerie, où nous eûmes le réel avantage de maintenir la ligne ennemie sur une perpendiculaire la rapprochant toujours de la frontière belge. Les combats de Tracy-le-Mont,, Lassigny, Roye, Péronne, Albert, forment dans leur ensemble la bataille de Picardie. La bataille d'Artois, autour d'Arras, suivit en octobre, et fut suivie par la bataille des Flandres, qu'illustrent les chocs héroïques de Lens et de La Bassée. Enfin, les armées anglo-françaises rentrent en Belgique par son extrémité du Sud et aboutissent à la mer juste à temps pour recevoir ce qui subsistait de l'armée belge, venant d'Anvers, tombé le 9 octobre, sous les coups de l'artillerie lourde des Allemands.

Quelques jours auparavant, le noble roi des Belges, Albert 1er, était sorti de la place, à la tête de ses troupes ; par Gand et Bruges, il avait gagné Ostende, et de là, en suivant la côte, atteint, le 12 octobre, le petit coin de terre qui allait être encore la Belgique indépendante. Tandis que son gouvernement acceptait, au Havre, l'hospitalité française, il devait lui, ne jamais quitter le sol de sa patrie, attendant là et préparant les hautes réparations promises par l'avenir.